
L’ONG Initiative Locale pour le Développement Intégré (ILDI) a organisé ce mercredi 29 octobre, une table ronde à Kinshasa, axée sur la fiscalité du tabac et le financement du système de santé en République démocratique du Congo. L’objectif est de créer un espace d’échange permanent pour renforcer ces domaines vitaux.
Cette rencontre a rassemblé le gouvernement, les partenaires au développement et la société civile de lutte antitabac, tous mobilisés par la disposition L’article 26 alinéa 2 de la CCLAT recommande aux Etats membre de fournir un appui financier en faveur des activités nationales visant à atteindre l’objectif de la Convention, conformément aux plans, priorités et programmes nationaux.
Godefroid Mboyo, Coordonnateur a.i de l’ONG ILDI et Manager du Projet TTAA-RDC, a souligné l’urgence de revoir la structure des taxes sur le tabac en RDC. Le modèle de simulation des effets de la fiscalité du tabac en RDC (SimTaxRDC) développé par le Consortium pour la recherche économique et sociale, avec l’appui financier de Tax Justice Network Africa propose un système mixte sur les cigarettes (ad-valorem & spécifique) qui montre une progression significative de la part de la taxe totale dans le prix de vente au détail d’un paquet de 20 cigarettes. Estimée à 26% en 2025 (année de base), cette part devrait atteindre 32% en 2027, 39% en 2029, 47% en 2031, et 58% en 2033, pour finalement atteindre 70% en 2035, conformément à l’objectif fixé par la Convention-Cadre de l’OMS pour la Lutte Antitabac (CCLAT)….Ainsi, plus de 56000 personnes cesseront de fumer et plus de 19000 vies seront sauvées d’ici 2035.
.La consommation de tabac demeure la première cause de décès évitable au niveau mondial, tuant près de 8 millions de personnes chaque année par des cancers, des maladies cardiaques et respiratoires. Elle engendre également des centaines de milliards de dollars de pertes économiques. L’addiction tabagique est une épidémie mondiale qui frappe particulièrement les pays les plus vulnérables, d’où la nécessité d’une lutte implacable.
Mukenyi Badibanga, Directeur Général Adjoint de l’Institut National de Santé Publique (INSP), a insisté sur l’importance d’évaluer l’efficacité des taxes sur le tabac pour augmenter les recettes nationales, renforcer le financement de la santé conformément à l’article 26 de la convention cadre, et accélérer la ratification du protocole de l’OMS pour éradiquer le commerce illicite du tabac en RDC. Les résolutions de cette table ronde visent à aider les Ministères de la Santé Publique, Hygiène et Prévoyance Sociale et des Finances à optimiser la collecte des recettes et à financer efficacement le système de santé publique. « Je crois qu’avec l’utilisation des nouvelles technologies, il y a lieu de pouvoir réduire la fraude suffisamment », a-t-il précisé.
A l’en croire, la taxation du tabac ne doit pas être perçue comme une simple taxe, mais comme un instrument de bien-être collectif, contribuant à une économie plus saine et équitable. Unya Mutuba Aurèle, Inspecteur à la Brigade de lutte contre la fraude de la DGDA, a affirmé l’engagement de la DGDA à renforcer ses efforts par la formation du personnel et la coopération internationale pour un meilleur suivi des chaînes de valeur du tabac, faisant de la fiscalité du tabac un pilier de la santé publique.
La corruption : un obstacle majeur
La lutte contre le tabagisme est un enjeu de santé publique mondial, mais elle se heurte à un obstacle de taille : la corruption. Celle-ci permet à l’industrie du tabac d’influencer les décisions et d’affaiblir l’adoption de réglementations efficaces, comme l’augmentation des taxes. L’Inspecteur Unya Mutuba Aurèle a souligné que la contrebande, la surfacturation, la fraude et le blanchiment de capitaux liés au commerce du tabac privent l’État de recettes importantes.
Dans un contexte où les intérêts commerciaux priment souvent sur le bien-être citoyen, la corruption fragilise la Convention-cadre de l’OMS et les efforts mondiaux. La dénonciation et l’élimination de cette corruption sont donc cruciales pour que les politiques anti-tabac puissent enfin déployer tout leur potentiel salvateur.
Le Directeur Général Adjoint de l’INSP a reconnu l’ambition de mettre fin à la fraude, mais a insisté sur la nécessité de la réduire. Il a suggéré d’intégrer la numérisation, un pilier du programme du Chef de l’État, pour lutter efficacement contre la fraude grâce aux nouvelles technologies. Godefroid Mboyo a ajouté que la lutte est multisectorielle et appelle à la conscience de tous, car laisser les gens être tués par un produit nocif revient à y participer.
En conclusion des travaux, deux rapports d’études intitulées: « Estimation du commerce illicite du tabac et des effets sur la fragilisation de la politique fiscale en RDC » et « Industrie du tabac et la politique fiscale en RDC»
Le premier rapport qui aborde une approche économico-statistique éstime à travers une identité comptable (méthode des écarts) le volume du commerce illicite du tabac et les recettes perdues sur une période de 2017-2023. Le second rapport fait une cartographie plus large de l’industrie du tabac et analyse ses pratiques transgressives en défaveur des politiques fiscales mises en places jusqu’ici en RDC…
Sarah MANGAZA











