
À l’approche de la COP30, une étude alarmante de la Rainforest Foundation UK (RFUK) met en lumière l’expansion fulgurante des projets de compensation carbone en République démocratique du Congo (RDC). Ces initiatives, présentées comme des solutions climatiques, sont accusées de violer les droits des peuples autochtones et des communautés locales, tout en offrant des bénéfices environnementaux incertains.
Le rapport de la RFUK, intitulé « La Grande Ruée Vers l’Or Verte », dépeint un tableau complexe de transactions opaques et d’acquisitions foncières massives à travers la deuxième plus grande forêt tropicale du monde. La RDC, souvent désignée comme un « pays solutions » dans la lutte contre le changement climatique, est devenue un acteur central du Marché Volontaire du Carbone (MVC). Cependant, l’enquête de deux ans menée par la RFUK suggère que ce marché risque de se transformer en une nouvelle forme d’exploitation plutôt qu’en un instrument de protection.
Principales conclusions du rapport :
- Allocations foncières massives : Pas moins de 71 projets de compensation carbone terrestre ont été recensés, couvrant une superficie stupéfiante de 103 millions d’hectares, soit près de la moitié du territoire national. Des accords supplémentaires entre le gouvernement et le secteur privé concernent plus de 80 millions d’hectares, soulevant de sérieuses préoccupations quant aux chevauchements des revendications et des droits fonciers.
- Spéculation et recherche de rente : La majorité des entreprises impliquées dans ces projets de compensation carbone possèdent peu ou pas d’expérience en matière de conservation forestière. Fait troublant, des sociétés d’exploitation forestière figurent parmi les principaux acteurs de cette tendance, ce qui interroge sur les véritables motivations derrière ces initiatives.
- Manque de transparence : Le registre national du carbone, bien que publié fin 2024, demeure fragmenté et incomplet, en dépit des obligations légales de divulgation publique.
- Peu de projets crédibles : Seuls 15 projets semblent avoir obtenu une validation nationale, et seulement trois ont confirmé la vente de crédits carbone sur le marché international.
- Impacts néfastes : Le rapport documente des illégalités et des violations des droits, avec des communautés locales systématiquement exclues des décisions clés affectant leurs terres. Parallèlement, peu de preuves attestent que ces projets contribuent réellement à freiner la déforestation croissante en RDC.
Face à ces constats alarmants, la RFUK lance un appel urgent à des réformes du financement climatique en RDC et à l’échelle mondiale. L’organisation insiste sur la nécessité de garantir la transparence, le respect des droits fonciers et l’obtention du consentement libre, préalable et éclairé (CLPE) des communautés concernées.
Recommandations de la RFUK :
- Un examen exhaustif de tous les projets de carbone et des concessions de conservation en RDC, accompagné d’un moratoire sur les nouveaux projets jusqu’à l’établissement d’un cadre juridique et institutionnel solide pour encadrer ces programmes.
- Une priorité accrue accordée aux alternatives non marchandes aux marchés du carbone, qui dirigent les financements plus directement vers les communautés locales, et un soutien renforcé aux forêts communautaires et aux autres approches fondées sur les droits.
Alfredo Prince NTUMBA











