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Diplôme ou compétences pratiques, défis et perspectives de l’emploi des jeunes (TRIBUNE)

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A l’instar de la ruée vers l’or au milieu du 19ème siècle en Amérique, il s’observe depuis peu, dans le chef des acteurs publics, politiques ou leaders d’opinion en République Démocratique du Congo, une tendance effrénée à vouloir décrocher de nouveaux titres académiques, celui de « Docteur » PhD (Philosophiæ Doctor) étant particulièrement des plus convoités. Chaque « grande affiche politique » voudrait devenir « Docteur » ou « Professeur » en ceci ou en cela !

Est-ce vers l’obtention d’un PhD qu’il faut tourner le regard de la jeunesse congolaise en quête de repère et modèle de réussite sociale ? Dans le contexte socio-économique actuel de la République Démocratique du Congo, l’orientation des jeunes vers la formation professionnelle ne devrait-elle pas être la priorité la plus urgente ?  

Certes, bien que la recherche fondamentale soit importante pour le développement à long terme, la formation professionnelle peut permettre de répondre à l’urgence de l’emploi, stimuler les secteurs productifs tels que l’agriculture, les mines et les services ; aider à lutter contre la pauvreté, réduire l’économie informelle ou, même, à valoriser le capital humain. 

C’est donc à juste titre que le Gouvernement Suminwa I et II, a fait de la formation professionnelle en RDC un pilier majeur de la croissance économique et de l’employabilité des jeunes. Des initiatives inédites et réalisations dans ce secteur, en disent long :

• Le lancement d’un programme de certification des métiers, qui est en fait une Valorisation des Acquis de l’Expérience (VAE). Programme qui vise à reconnaître et certifier officiellement les compétences acquises par les travailleurs du secteur informel, leur permettant ainsi de formaliser leur statut professionnel et d’améliorer leur employabilité. 

• La Promotion de l’intégration de la formation dans les grands projets d’investissement : Le gouvernement répète continuellement l’intégration systématique d’un volet « formation professionnelle » dans tous les grands projets d’investissement (tels que la Cité Industrielle Chine-Congo). L’objectif est de s’assurer que la main-d’œuvre locale soit qualifiée pour occuper les emplois générés par ces projets, réduisant ainsi le recours excessif à la main-d’œuvre étrangère.

• La Coopération internationale et bourses d’études : ici, la Première ministre SEM Judith Suminwa a encouragé les boursiers bénéficiant de formations professionnelles à l’étranger à revenir en RDC pour mettre leurs compétences au service du pays.

• L’Organisation et la participation à des forums régionaux : Le gouvernement a accueilli et participé activement à des forums régionaux, tels que le Forum de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC) sur l’Enseignement et la Formation Techniques et Professionnels (EFTP), afin de développer des stratégies communes pour l’employabilité des jeunes.

• Des mesures législatives et réglementaires sont à l’étude pour renforcer le cadre politique et législatif. 

Ce cadre devra permettre de créer plus d’emplois au profit de dizaines de milliers de jeunes qui arrivent sur le marché du travail chaque année et de réduire le niveau de sous-emploi. 

Ainsi, grâce à la formation professionnelle, des emplois générés peuvent couvrir des métiers dans divers secteurs.

Agriculture et agro-industrie : rentabiliser le secteur et la chaine de valeur

Le secteur agricole congolais est sous-exploité, malgré son potentiel. Une formation professionnelle adaptée peut transformer ce secteur pour assurer la sécurité alimentaire nationale mais aussi générer des revenus. Des agriculteurs bien formés en techniques agricoles, durables et innovantes, peuvent augmenter sensiblement les rendements. Ainsi, un agriculteur formé peut passer de la culture sur brûlis à des techniques de rotation des cultures, augmentant sa production et protégeant la fertilité des sols. 

La formation peut aussi assurer la transformation agro-alimentaire, notamment avec l’acquisition des compétences en conservation, transformation et commercialisation des produits agricoles. Ceci peut créer des emplois en réduisant la dépendance aux importations. Si nous continuons à enrichir les importateurs sans soutenir la transformation locale et à consommer fièrement congolais, que restera-t-il de nos terres et à nos jeunes ? La RDC doit se tourner vers une agriculture industrielle et non plus, une de subsistance.

Mines et exploitation minière : compétences congolaises pour une appropriation locale

Le secteur minier est la force motrice de l’économie congolaise. Une formation professionnelle qualifiée peut renforcer la main-d’œuvre locale et optimiser les bénéfices pour le pays. Plusieurs métiers dans le secteur minier congolais manquent d’experts locaux qualifiés : des techniciens pour l’entretien des machines, la soudure, la métallurgie l’électricité industrielle et la mécanique générale pour ne citer que ceux-là. 

Avec une expertise locale de haute et parfaite fiabilité technique, une entreprise minière peut, au lieu de dépendre d’experts étrangers, décider d’embaucher des techniciens congolais pour la maintenance de ses machines, réduisant les coûts et garantissant des emplois durables. Des formations peuvent aussi être proposées aux creuseurs artisanaux sur des techniques d’extraction plus sûres et moins destructrices pour l’environnement. Sur ce plan, de bonnes pratiques aideraient à limiter la pollution des eaux et les risques d’accidents, en plus d’une initiation à la gestion et la commercialisation. 

Technologies de l’information et de la communication (TIC) : gage pour la modernisation du pays

Le développement des infrastructures numériques et l’adoption de la technologie sont essentiels pour la modernisation du pays. Des jeunes peuvent être formés comme développeurs pour créer des applications répondant aux besoins locaux, comme le mobile banking ou des plateformes e-commerce. Une application mobile pour aider les agriculteurs à suivre les prix du marché, les conditions météorologiques, etc. Certes certaines de ces applications existent déjà mais où ? dans les grandes villes pour ne pas dire à Kinshasa seulement. Notre pays, c’est plus 100 millions d’habitants dont 70% sont des jeunes ! 

Des jeunes qui peuvent facilement intégrer des formations en cybersécurité, entretien de réseaux etc. Si seulement un encadrement effectif et actif pouvait être mis en place, ces mêmes jeunes qui ont facilement compris – sans formation – les systèmes Tiktok, Snap, YouTube et autres, pourraient se former à bon escient plutôt que de s’abrutir et hébéter d’autres en passant leur temps à propager de fausses informations ou à devenir des nyonsologues (bayebi nyonso, ils en savent tout sur tout, tout le temps).

Leur talent serait bien plus profitable à la nation s’ils devenaient experts en techniques agricoles, cyber-gestion, maintenance informatique ou guerrier du numérique face aux ennemis du pays…

Bâtiment et travaux publics (BTP) : accompagner l’élan de (re-)construction du pays

Curieusement, alors que des dizaines de bâtiments poussent comme des mauvaises herbes à travers la République, la main d’œuvre spécialisé est de moins en moins visible. Un coup d’œil sur les grands chantiers révèle une triste réalité : les techniciens sont souvent des étrangers ! Où sont passés nos maçons, électriciens, plombiers et menuisiers pour les chantiers de construction ? 

Grâce à la formation professionnelle, des cadres, intermédiaires et supérieurs, pour la gestion de grands projets d’infrastructure peuvent être produits. Et, un chef de chantier formé aux normes internationales peut gérer efficacement la construction d’un pont ou d’un hôpital, en respectant les délais et les budgets. Il n’est pas normal que dans un pays à fort taux de chômage, les constructeurs aient recours à de la main d’œuvre venant de Singapour, ou ailleurs pour ériger des bâtiments. 

Services et hôtellerie : 

Il a été démontré à maintes reprises dans le monde entier que le secteur des services et du tourisme sont des moteurs de croissance, surtout s’il peut proposer une offre de qualité, notamment pour l’accueil et la restauration, la gestion hôtelière, etc.

Tous les miniers quelle que soit leur spécialité, ont besoin de manger et de cantine pouvant servir des centaines d’employés en même temps. 

Les grands groupes tels que Hilton, Accor, Golden Tulip commencent à s’implanter en nombre dans la capitale kinoise et ailleurs : même constat : un personnel sous-formé, sans connaissances de leurs produits et des personnels recyclés d’anciennes entités. A quand ces formations de grandes échelles ? Et pourquoi pas des programmes de recyclage en rotation permanentes ?

Quelle option levée pour la RDC : recherche fondamentale ou formation professionnelle ? 

Ainsi, une approche pragmatique et complémentaire est nécessaire. Priorité immédiate : Orienter massivement les jeunes vers des programmes de formation professionnelle, en ciblant les secteurs les plus porteurs (agriculture, technologie, etc.) et en s’assurant que les formations correspondent aux besoins réels du marché.

Allouer des ressources pour soutenir la recherche fondamentale, mais de manière stratégique. Cela pourrait se faire en finançant des laboratoires ou des programmes universitaires qui ont un lien avec les besoins de développement du pays.

Dans notre société héritière d’une culture paternaliste, les leaders d’opinion (politiques, culturels ou sociaux…), de par leur comportement social se positionnent souvent dans la psychologie des jeunes comme des modèles voués à l’imitation. Leur attitude induit dans la jeunesse des mécanismes de projection et d’identification mimétique. N’est-il pas, de lors, de la responsabilité de ces leaders de montrer le chemin qui valorisera et rendra, à la jeunesse déboussolée, sa fierté ? Non pas forcément le chemin vers la quête des titres académiques pompeux et prestigieux, mais vers la recherche des solutions professionnelles immédiates dont le pays a cruellement besoin en ce moment ! Il n’y a pas de sot métier plutôt des sottes gens qui continuent par mimétisme pédant à vouloir devenir « Docteur es » quelque chose alors que n’ayant pas de parcours académique officiel et à bourrer la tête des millions de jeunes d’une « science sans conscience » – comme l’a si bien chanté Alpha Blondy !

Soyons réalistes : nos jeunes voudraient savoir comment gagner leur vie et nourrir leurs futures familles : orientons-les vers des métiers d’avenir pour ce pays et encourageons le Gouvernement dans son engagement pour la formation professionnelle comme point d’émergence d’une véritable classe moyenne en RDC.

Olivier Kaforo

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