
Un projet transfrontalier ambitieux, intitulé « Lutte contre le trafic d’animaux sauvages, du bois et d’autres ressources naturelles en RDC », a été lancé ce vendredi 20 juin 2025 à Kinshasa. Cette initiative multipartite, portée par la Fondation Africaine pour la Faune Sauvage (AWF) en collaboration avec l’ONG Juristes pour l’Environnement au Congo (JUREC), Conserv Congo, Observatoire pour la gouvernance forestière (OGF), l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) et l’Institut National Angolais pour la Biodiversité et les Aires de Conservation (INBAC), vise à renforcer l’application transfrontalière de la loi et la résilience des communautés face à la criminalité environnementale
Le corridor de Lobito ouvre rapidement de nouvelles routes pour le commerce et le développement régionaux. Chose qui crée un risque de trafic à travers les principaux postes-frontières comme Lufu et Luau-Dilolo ; ils deviennent de plus en plus aigu. Ainsi, les éléphants de forêt, les grands singes et la flore menacée de la République démocratique du Congo sont confrontés à des menaces sans précédent, exacerbées par des réseaux criminels organisés qui exploitent la porosité des frontières et la faiblesse des contrôles de transit. Ce nouveau projet propose donc un modèle d’action intégrée, piloté par le leadership africain et fondé à la fois sur la science et la collaboration communautaire.
« AWF a procédé à une analyse approfondie de ses interventions dans plusieurs pays africains et a constaté qu’il y a un problème moins ciblé : celui du trafic illégal de la faune sauvage. Voilà pourquoi dans sa stratégie 2020-2030, elle s’est assigné d’autres objectifs avec 3 approches à savoir : leading for life, investir sur l’homme pour qu’il prenne à bras le corps la question de la conservation ; leading for one life et caring for one life. » A déclaré Antoine Tabu Senga, Directeur pays de AWF en RDC.
A l’en croire, la RDC avec ses 2345000 Km2 et 10740 Km de périmètre dont 14% se trouvent dans les aires protégées transfrontalières car elle partage ses frontières avec 9 pays d’Afrique, est une position géostratégique au cœur de l’Afrique, doublée de ressources naturelles immenses, avec une grande endémicité. C’est ce qui justifie cette propension au trafic illégal des espèces de faune sauvage que le pays subit. Avec l’ouverture du corridor de Lobito, la tâche deviendra plus complexe. Raison pour laquelle ce projet a été conçu. Il répondra aux éventuelles menaces qui pèsent sur la faune et la flore. D’où, la nécessité de ce partage d’expérience entre la RDC et l’Angola, basé sur les avantages que pourraient tirer les deux pays en collaborant efficacement.
« L’Angola s’associe à cette initiative avec un engagement ferme en faveur du renforcement de la coopération régionale pour lutter contre le trafic d’animaux sauvages, de bois et d’autres ressources naturelles. Ce phénomène de nature transnationale exige des réponses coordonnées, efficaces et durables. Nous réaffirmons notre totale disponibilité à travailler avec la RDC, les Etats-Unis, AWF et d’autres partenaires dans la mise en œuvre de ce projet, essentiel pour la protection des écosystèmes et la sécurité environnementale régionale. » A indiqué Filomena Ilda Tumba, Cheffe du Département du Service conseil au Ministère de l’environnement d’Angola.
Les frontières, clé de la lutte contre le trafic transfrontalier des espèces sauvages

Filomena Ilda Tumba a ajouté que l’Angola a enregistré des avancées importantes telles que l’approbation de la loi sur les zones de conservation environnementale et du régime de carrière des Agents de contrôle environnemental, des lois permettant d’améliorer l’action sur le terrain, en renforçant l’autorité des agents de contrôle et la capacité de la réponse de l’Etat. Il y a donc lieu d’affirmer que la sécurité environnementale régionale passe par l’efficacité des frontières. Selon le Directeur technique et scientifique de l’ICCN, renforcer les frontières est l’une des solutions adéquates pour gagner cette lutte. « La raison de ces trafics est simple : les frontières sont malléables. Nous demandons donc une collaboration sincère de tous les services, sans laquelle on ne fera absolument rien. Ce que nous perdons actuellement dans ces trafics peut développer notre pays. Il s’agit de milliards de dollars américains. » A martelé Paulin Tshikaya.
Une affirmation que la Direction Générale des Douanes et Accises ne partage pas. « Les efforts à fournir sont certes multiples, mais il faut aussi reconnaître les efforts. Ne voyons pas seulement ce qui ne marche pas. Toutes les douanes du monde ont comme mission principale de générer des recettes. Beaucoup de formations se font pour plus d’efficacité. Sachons aussi que parfois ce qui est saisi ne passe pas officiellement par nos douanes. Il y a aussi un grand facteur non négligeable : la guerre. Dans les zones attaquées, les douaniers fuient. Par conséquent, le trafic se fait n’importe comment car les frontières sont incontrôlées. » A expliqué Amisi Senga, Sous-Directeur de Brigade et lutte contre la fraude à la DGDA.
Dans le souci de lutter contre la destruction de la faune en Afrique en général et en RDC en particulier, l’AWF a formé plusieurs Officiers Judiciaires afin d’assurer l’efficacité de ces actions. Ce projet représente un nouveau défi car, si beaucoup a été fait, beaucoup reste à faire. L’implication totale du gouvernement de la République pour définir une politique de conservation s’avère donc très nécessaire. La conservation de la faune implique des recherches sur les espèces et sur la manière dont elles interagissent avec les humains, constituant la base de la création de programmes bénéfiques tant pour les humains que pour les animaux.
Sarah MANGAZA